Aleksandar Vučić, un Premier ministre autoritaire et européiste
La nouvelle victoire du Parti progressiste serbe (SNS) aux élections législatives, qui se sont déroulées le 24 avril dernier, a confirmé la domination exercée par le Premier ministre Aleksandar Vučić sur la politique serbe. Le pays aura attendu deux semaines pour avoir les résultats définitifs, le SNS remporte donc le suffrage et la majorité absolue avec 48,5% des voix, et 131 sièges parlementaires sur 250, derrière le parti de centre gauche (SPS) recueil 10,95% des votes. Si la fonction la plus importante en Serbie reste celle de chef de l’État, incarné aujourd’hui par le Président Tomislav Nicolić, lui-même issu de la SNS, le Premier ministre possède le titre de «Président du gouvernement ». Un statut qui lui confère par exemple plus de pouvoir que celui de son homologue français à titre de comparaison.
Critiqué pour son autoritarisme, ses aspirations à l’hégémonie et la prise de contrôle des grands médias par quelques entreprises privées liées à son parti, le Premier ministre serbe, en poste depuis 2014, participe pourtant activement au processus d’adhésion de la Serbie à l’Union Européenne.
Implacable dans sa politique intérieure, qu’il mène à la manière d’un Viktor Orbán, ses positions extérieures lui valent la clémence générale à l’international. La Serbie étant historiquement et culturellement liée à la Russie, Aleksandar Vučić se montre capable d’engager le processus d’adhésion à l’UE tout en restant proche de la Russie. Lors de la crise ukrainienne, la Serbie a refusé de voter pour les sanctions contre la Russie lors du scrutin organisé à l’ONU. Au niveau économique, Vučić sait aussi ménager les différentes institutions, en appliquant les consignes d’austérités commandées par le FMI.
Un nouveau départ pour les Balkans
Durant les années 90, une série de conflit débute dans les Balkans et aboutira à l’explosion de la Yougoslavie. La Serbie étant la principale République yougoslave tant au niveau juridique qu’économique, se retrouve face aux provinces indépendantistes. Les principaux conflits concerneront la Serbie, opposée à la Croatie et à la Bosnie (1992-95), puis au Kosovo à partir de 1999. À cette époque (98-2000) Aleksandar Vučić est ministre de Slobodan Milošević (jugé pour crimes contre l’humanité), nous lui devrons des déclarations chocs comme : « Pour un Serbe tué, nous tuerons cent musulmans», ce qui lui vaut encore aujourd’hui d’être régulièrement interpellé sur ce sujet. Le dernier exemple date des commémorations du massacre de Srebrenica, où il fût la cible de jets de pierre.
Son virage politique commence en 2008 lorsqu’il quitte les Radicaux pour fonder le Parti progressiste, après sa libéralisation, il évoquera a de multiples reprises « ses erreurs » passées. Un mea culpa qui paraît crédible aujourd’hui, avec sa volonté de renouer le dialogue avec ses homologues kosovar et bosnien, mais aussi en tentant de séduire Bruxelles et Washington.
Avocat de formation, ex ultra-nationaliste, devenu partenaire du Kosovo, dirigeant autoritaire, favorable à une intégration de la Serbie dans l’UE, tout en étant favorable à la politique russe, Aleksandar Vučić semble aussi pragmatique qu’imprévisible.